Poursuite des associés d’une société civile
Quand un créancier a pour débiteur une société civile (SCI, SCP, SCCV, etc…) il a, contrairement à ce qu’il se passe pour une SARL par exemple, la possibilité de se retourner directement contre les associés de la société civile.
En effet, alors que l’associé d’un SA ou d’une SARL est protégé par la société, l’associé d’une SCI, d’une SCP, d’une SCCV… est responsable sur ses biens propres des dettes de la société civile.
Ainsi, le créancier d’une société civile défaillante peut aller rechercher auprès des associés le règlement de sa dette.
Dans quelles conditions ?
Toutefois, chaque associé n’est tenu qu’à proportion de ses parts dans la société civile. Ainsi, un associé détenant 50% du capital d’une SCCV peut se voir réclamer 50% de la dette de la société due au créancier. En effet, l’article 1857 du code civil est ainsi rédigé : « A l’égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l’exigibilité ou au jour de la cessation des paiements. L’associé qui n’a apporté que son industrie est tenu comme celui dont la participation dans le capital social est la plus faible. »
Encore faut-il que la société civile ait été vainement poursuivie.
En effet l’article 1858 du code civile dispose que « les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dette sociales contre associé qu’après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale. »
Faut-il pour autant attendre que la société civile se trouve en liquidation judiciaire pour pouvoir rechercher le règlement auprès des associés ?
Alors que pendant longtemps, les tribunaux ont refusé que des poursuites soient entamées envers les associés d’une société civile à moins qu’elle ne soit en liquidation judiciaire, la Cour de Cassation a, par un arrêt du 26 juin 2012, clarifié cela en estimant que « la circonstance qu’une personne morale ne fasse pas l’objet d’une procédure collective n’est pas de nature à exclure que le patrimoine social soit insuffisant pour désintéresser le créancier ».
Ainsi, pour pouvoir entamer des poursuites à l’encontre des associés, il suffira de justifier que les poursuites contre la société civile sont vaines.
Ainsi, il conviendra tout d’abord de mandater un huissier de Justice pour entamer des poursuites à l’encontre de la société civile, et ce n’est qu’en cas d’échec (saisies-attribution infructueuses, PV de carence, etc…) que les poursuites pourront être engagées à l’encontre des associés.
Comment entamer les poursuites ?
Le titre exécutoire condamnant la société civile n’est pas directement opposable aux associés ne vaut pas titre exécutoire à leur encontre. Toutefois, au vu de ce titre et des pièces de poursuites vaines, le juge des référés pourra ordonner que soient condamnés les associés au paiement d’une provision, à concurrence de leur part dans le capital de la société.
Ce n’est qu’une fois cette ordonnance de référé rendue, que le créancier pourra alors entamer des procédures à l’encontre des associés.
Le cas particulier d’un associé en industrie
L’associé qui n’a apporté que son industrie est tenu comme celui dont la participation dans le capital est la plus faible .
Il doit en être tenu compte lors du calcul de la contribution de chacun des associés.
A tire d’exemple, dans le cas d’une Société Civile Professionnelle (100 parts) comprenant trois associés, dont le premier est apporteur en industrie, le deuxième détient 75 parts et le troisième 25 parts, l’apporteur en industrie sera tenu au paiement des dettes sociales à hauteur de 25 parts.
Ainsi pour une dette sociale de 20 000 €, la participation de chacun des associés est la suivante :
– associé détenant 75 parts : (20 000 € / 125) x 75 soit 12 000 €
– associé détenant 25 parts : (20 000 € / 125) x 25 soit 4 000 €
– associé apporteur en industrie : (20 000 € / 125) x 25 soit 4 000 €
Le cas de la société civile dissoute
Le 11 juin 2013, la Cour de Cassation a été amené à préciser le sort des poursuites à l’encontre des associés d’une société civile dissoute.
En effet, si l’article 1859 du code civil précise que « toutes les actions exercées contre les associés non liquidateurs ou leurs héritiers et ayants cause se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société », la Cour de Cassation a opéré une distinction entre les actions exercées dans le bt de recouvrer une dette de la société dissoute et celles exercées pour obtenir le recouvrement d’une dette d’un associé envers la société dissoute.
Ainsi, dans cette affaire l’associé d’une société civile dissoute était redevable d’une somme d’argent à ladite société. Afin de se soustraire à ce paiement, il invoquait la prescription de 5 ans édictée à l’article 1859 précité.
La Cour de Cassation ne lui a pas donné raison en estimant que la prescription quinquennale de l’article 1859 ne vise que les actions en recouvrement auprès d’un associé d’une dette contractée par une société dissoute.